Les Dires de Zeta: Sectes Suicidaires


Jim Jones en Guyane, Aum au Japon, et David Koresh à Waco représentent un aspect de la réponse humaine sociale rarement comprise par ceux qui regardent avec horreur comment les adeptes participent à des rituels de meurtre et de suicide. Que se passe-t-il ici? Pour comprendre, il faut revenir en arrière et observer la secte suicidaire à ses débuts.

L’ingrédient clé est un chef charismatique. Le mystère de cette figure de proue disparaît si on compare son rôle de chef de secte à la figure du père dans un foyer normal. Quelles sont les similarités et où sont les différences? Les deux sont des hommes, les deux profitent sexuellement de ceux qui en sont dépendants, les deux sont supposés prendre les décisions finales, les deux ont une autorité légale ou traditionnelle qui justifie qu’ils aient le contrôle sur ceux qui dépendent d’eux, et les deux tendent à être possessifs par rapport à ce qu’ils considèrent être leur territoire. Beaucoup vont être horrifiés que nous comparions les chefs de sectes, qu’ils considèrent mauvais et peut-être même possédés par Satan, à la figure masculine du foyer, mais les facteurs qui poussent les adeptes à des rituels de meurtre et de suicide se retrouvent dans les foyers ordinaires.

Si nous avons décrit le chef, décrivons à présent les adeptes et comparons les aux membres d’un foyer moyen. Ils sont économiquement dépendants, par le seul fait d’avoir donné leur fortune et leurs services au chef, de la même manière que la plupart des épouses livrent ce qu’elles ont gagné aux bons soins de leur mari. Ils ont compris que défier les ordres du chef ne leur amènera que punitions, telles qu’un isolement physique ou même quelque forme de torture en cadeau, de la même façon qu’un enfant désobéissant sera envoyé à sa chambre, fessé, privé de dessert, et qu’une épouse désobéissante sera menacée d’abandon ou de raclée. Comme les adeptes reçoivent de l’aide, et dans la plupart des cas de l’amour et de l’attention aussi, de la part du chef de la secte ou bien, dans notre comparaison, de la figure du père, ils se convainquent eux-mêmes que les privations sont raisonnables et justifiées. Cette attitude élimine le trouble ou le conflit. Si celui qui est à la tête du foyer a émis une règle d’or en ce qui concerne son stock de bière fraîche, et qu’une épouse bien traitée sinon enfreint la règle en piquant dans le stock lors de sa soirée entre femmes, alors elle conclura probablement l’avoir cherché lorsqu’il la fera saigner du nez ensuite. De cette façon, la vie peut continuer.

Maintenant que ces choses sont établies, que se passe-t-il pour que les adeptes en viennent à des rituels de meurtre et de suicide? En gros, le chef de la secte, après s’être installé en tant que figure paternelle ou chef du foyer aux yeux de ses adeptes, commence à changer les règles. Cela se passe progressivement, et d’une façon qui n’est pas sans rappeler ce qui se passe dans les foyers où les enfants commencent à être abusés sexuellement comme une extension du rapport normal entre mari et femme. Dans ce cas, l’épouse s’entend dire que c’est sa faute si les enfants ont été abusés, car elle n’est pas à la hauteur, quelque part. Le chef de la secte utilise aussi la culpabilité, de sorte que la punition pour certaines infractions devienne un rite. Une fois installé ainsi, le chef de la secte ou le père abusif accroît la sévérité des punitions jusqu'à la mort d’un adepte ou d’un membre de la famille. Combien de fois a-t-on trouvé des enfants enchaînés au mur dans le sous-sol, presque morts de faim, alors que la mère, à l’encontre de tout instinct maternel, dirige le rituel de la punition ? On nous dit que l’enfant l’a bien cherché, l’a mérité, cela pour une légère faute qu’on n’aurait même pas remarquée dans une maison ordinaire.

Une fois que la secte, tout comme un groupe familial qui aurait glissé vers ce niveau d’obéissance et de dépendance, a assisté et participé à la punition rituelle qui menace la vie, la ligne a été franchie. S’identifiant aux autres, ils se voient mourir à leur tour, de sorte que le suicide devient mentalement acceptable. La mort a perdu de son horreur.

Que se passe-t-il à l’intérieur du cerveau du chef de la secte à ces événements? On comprend mieux si on contemple la famille que connaissent tous les voisinages. Le mari insiste pour que sa femme reste à la maison, et devient furieux si elle s’engage en une quelconque activité sociale à l’extérieur. Quant à ses garçons, soit ils deviennent de petits miroirs de leur père, soit ils quittent la maison en se rebellant violemment. Ses filles ne peuvent pas avoir de petit ami, et selon toute probabilité ont elles été abusées sexuellement d’une façon ou d’une autre. Il fréquente un groupe d’amis qui pense que rien ne cloche dans cette organisation, et il ne donne aucune chance de secours aux membres apeurés de la famille. Si on appelle les autorités à quelque moment que ce soit, ce dérangement est appelé un problème domestique. Que se passe-t-il quand ce père sent une menace qu’il ne peut contrôler? Il préférera détruire ce qu’il a plutôt que le perdre.